Version originale
Tempête
La tempête se donnait vraiment à fond. C'était l'occasion ou jamais. Elle avit passé des années à moisir en province, à jouer les secondes rafales, à se rôder, à prendre des contacts, de temps en temps à faire une entrée fracassante devant des bergers sans méfiance ou à brûler les planches d'une malheureuse baraque. Voilà qu'une relache dans la météo lui offrait la chance de tenir la vedette, et elle en rajoutait dans son rôle avec l'espoir qu'un gros climat la remarque.
C'était une bonne tempête. Elle projetait son feu intérieur, elle s'exprimait avec passion, et les critiques le reconnurent : pour peu qu'elle apprenne à mieux maîtriser son tonnerre, ce serait, d'ici quelques années, une tempête à suivre.
Les bois éclatèrent en applaudissements, se remplirent de brumes et de feuilles volante.
En de pareilles nuits, les dieux, comme précédemment signalé, jouent à autre chose qu'aux échecs avec les destinées humaines et les trônes royaux. Il est important de se rappeler qu'ils trichent toujours, jusqu'au bout...
Et un carrosse roulait à tombeau ouvert sur la piste forestière accidentée; il tressautait violemment chaque fois que les roues rebondissaient sur les rainces d'arbres. Le cocher excitait son équipage, et les claquements de son fouet composaient un joli contrepoint aux grondements de la tempête.
Derrière - pas loin, pour ne pas dire de plus en plus près - galopaient trois cavaliers encapuchonnés.
En de pareilles nuits s'accomplissent les mauvaises actions. Les bonnes aussi, c'est entendu. Mais surtout les mauvaises, dans l'ensemble.
© Terry Pratchett
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