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Le Créateur, Le Père Porcher, par Terry Pratchett

Le Père Porcher, par Terry Pratchett

La Mort ne se déplaçait pas en personne chaque fois qu'une existence venait à son terme. Ce n'était pas nécessaire. Les gouvernements gouvernent, mais les Premiers ministres et les présidents ne se déplacent pas physiquement chez les citoyens pour leur expliquer comment mener leur vie, ils risqueraient d'y perdre la leur. Il y a des lois pour ça.

Mais la Mort s'assurait de temps en temps que tout fonctionnait correctement ou, pour être plus précis, que tout cessait correctement de fonctionner dans les secteurs les moins importants de sa juridiction.

Pour l'heure il marchait dans des océans enténébrés.

Des nuages de vase s'élevaient autour de ses pieds tandis qu'il parcourait à grands pas le fond de la tranchée. Sa robe flottait autour de lui. Tout n'était que silence, pression et nuit profonde, totale. La vie y avait pourtant sa place, même si loin sous la surface : calmars géants et homards aux paupières hérissées de dents, créatures arachnoides affublées d'estomacs sur leurs pattes et poissons lumineux. C'était un monde cauchemardesque, noir et silencieux, mais la vie se développe à la moindre occasion. Dans le cas contraire, elle met un peu plus de temps.

La destination de la Mort était une légère élévation au fond de la tranchée. Déjà l'eau qui l'entourait se réchauffait et se peuplait davantage, surtout de bestioles qu'on aurait dites assemblées à partir des résidus de tout le reste.

Invisible mais sensible, une immense colonne d'eau bouillante montait d'une fissure. Quelque part en dessous gisaient des rochers que le champs magique du Disque portait presque à l'incandescence.

Des aiguilles minérales s'étaient déposées autour de l'orifice. Et, dans cette toute petite oasis, une forme de vie s'était développée. Sans besoin d'air ni de lumière. Ni même de nourriture dans le sens où l'entendent la plus part des autres espèces.

Elle avait grandi à la limite de la colonne d'eau, croisement entre un ver de terre et une fleur.

La Mort s'agenouilla pour l'observer parce qu'elle était minuscule. Mais pour une raison inconnue, dans un tel milieu dépourvu d'yeux et de lumière, elle était d'un rouge éclatant. La prodigalité de la vie dans ce domaine ne cessait jamais de l'étonner.

Il fouilla dans sa robe et en sortit un petit rouleau de matière noire, comme une trousse de bijoutier. Avec une extrême précaution, il prit dans une des poches à l'intérieur une faux miniature, la serra entre le pouce et l'index, et attendit.

Quelque part au-dessus, un courant vagabond délogea un éclat de rocher qui dégringola en soulevant de petits nuages de vase au gré de ses rebonds sur la paroi de la tranchée.

Il atterrit juste à côté de la fleur vivante avant de rouler et de l'arracher à la roche.

La Mort donna un coup de sa faux miniature au moment où la fleur se fanait...

On parle souvent de la vision toute-puissante de diverses entités fabuleuses. On les dit capables de voir la chute du moindre moineau. Et c'est peut-être vrai. Mais une seule est toujours là quand il s'écrase par terre.

L'âme du ver de la tranchée était microscopique et rudimentaire. Elle ne s'encombrait pas de péchés. Elle n'avait jamais convoité les polypes du voisin. Elle n'avait jamais flambé au jeu ni bu d'alcools forts. Elle ne s'était jamais embarrassée de questions comme "Pourquoi suis-je ici ?" vu qu'elle n'avait aucune conscience du "où" ni, en l'occurrence, du "jeu".

Le fil chirurgical de la faux libéra néanmoins quelque chose qui disparut dans les eaux tumultueuses.

La Mort rangea soigneusement son instrument et se releva. Tout allait bien, tout se passait à sa convenance, et...

... mais il n'en était rien.

De la même manière que l'excellent technicien entend le changement subtil signalant un palier défectueux bien avant que le plus précis des instruments ait détecté la moindre anicroche, la Mort nota une dissonance dans la symphonie du monde. Une fausse note parmi des millards, mais d'autant plus évidente, comme un tout petit caillou dans une très grande chaussure.

Il agita un doigt dans l'eau. L'espace d'un instant, le contour bleu d'une porte se dessina. Il la franchit et disparut.

Les créatures de la tranchée ne remarquèrent pas son départ. Elles n'avaient pas remarqué son arrivée. Elles ne remarquaient jamais rien.

© Terry Pratchett



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